19 September 2004

Colophon - spring (Dream By Degrees, 2002)

Durant le cours de l’année 2002, le label de San Francisco Dream By Degrees a sorti quatre vinyls 10’’ à édition limitée, célébrant chacun une des saisons. On a déjà croisé le « winter ep » de Coastal, voici maintenant le « spring ep » de Colophon en attendant le tour prochain du « summer ep » de Sappington et du « fall ep » de Loquat.


Comme pour Coastal, l’objet est ici aussi précieux et superbe que son contenu. Colophon est le projet solo de Jefre Cantu Ledesma par ailleurs leader de Tarentel. On navigue ici dans des eaux tout autant atmosphériques mais plus planes et brumeuses, plus électro-acoustiques et ambient que post-rock, plus laptop qu’amplis.

Deux plages. Chacune occupe une face, ‘Night Falls on 15th Street’ (9:44) d’un côté et ‘The Bougainvillea at Twilight’ (7:43) de l’autre. Quelques fragments de guitare acoustique tenue par Danny Grody lui aussi de Tarentel, un peu de piano, des sons électroniques, des nappes, des field recordings et de la reverb. Après une première écoute on a peur de se lasser rapidement, mais non, au fur à mesure les morceaux deviennent de plus en plus attachants et séduisants.

Jefre se place ici dans la lignée de gens comme Wolfgang Voigt, Oren Ambarchi, Ekkehard Ehlers ou Stephan Mathieu, pour autant on ne perd pas l’origine et la sensibilité indie, on sent bien la continuité également avec les productions de labels comme Temporary Residence (Tarentel, Sonna) ou Kranky ( Labradford, Windy & Carl, Stars of The Lid). On ne peut pas parler simplement de musique électronique ou d’ambient ici, tant Colophon fait preuve de profondeur, il y a plutôt une volonté de transcender les genres pour développer une écriture impressionniste personnelle.

Les deux plages offertes ici sont extrêmement belles et envoûtantes, elles nous font voyager, nous entraînent dans leur monde. Elles contiennent cette dimension transcendante qui fait que lorsque l’on ferme les yeux, on continue à voir des paysages, comme si on basculait dans un autre monde.

La première plage, ‘Night Falls on 15th Street’, est relativement sombre. Une nuit noire comme au début du printemps, où l’hiver a oublié de complètement se retirer encore. Où la nature est toujours désolée. Même si on sent que la vie s’apprête à exploser ce n’est pas encore tout à fait pour demain. On avance le long de chemins boueux qui nous salissent les chaussures, tout en traînant nos vies sur nos épaules. Heureusement en fin de morceau, un piano céleste vient amener un peu de lumière, déchire la couche de nuages pour laisser entrevoir quelques étoiles où annoncer les premières lueurs de l’aube prochaine.

Mais ce qui fait passer ce ep de bon à exceptionnel et cet objet du statut de collector à disque vraiment essentiel, c’est la seconde plage, ‘The Bougainvillea at Twilight’ véritable rêve éveillé où toute la dimension printanière explose, où l’on se prend des bouffées d’oxygène comme chez Rafael Toral, où on a la sensation d’infini comme chez Labradford, l’impression et la certitude de communier avec un environnement en plein épanouissement verdoyant. Une musique qui fait toucher à une certaine essence de la vie, qui n’est nullement artefact, qui nous dépasse et nous emporte.

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